Mélanie Faye me glisse
Tu devrais lire À la ligne de Joseph Ponthus
Ça pourrait t’intéresser
Je lis
Et le choc
Un coup de poing dans la gueule
Comme une déflagration mentale et physique
Sans point ni virgule
Les mots les uns après les autres
Joseph Ponthus fait entendre
Les doutes
Les espoirs
La fatigue
La colère
L’amour
Le découragement
La résignation
La révolte
D’un intérimaire qui travaille en usine
Cette Usine qui dicte son urgence
Qui interroge par son rythme notre part de machine
Un texte d’une infinie humanité
Adapter et porter au théâtre ce roman poétique
C’est avant tout faire un travail d’interprétation
Laurent Nouzille
Pour être ce salarié de la douleur
Parfois ce salarié de l’horreur
Toujours ce salarié de l’honneur
Un.e musicien.nne
Batterie
Basse
Pour faire entendre le chant de l’Usine
Traduire la cadence infernale d’une chaîne de production
Nous balader dans l’univers des chansons populaires chères à l’auteur
Avec ce spectacle nous voulons retrouver un théâtre de la proximité
De la présence
Une scénographie très simple
Un rectangle au sol
Une armoire métallique
Un banc
Une proposition nous permettant de jouer partout
Dans des lieux singuliers
Avec la volonté de partager les douleurs du corps et de l’esprit
Mais aussi les moments de complicité de drôlerie entre ouvriers
Les moments de tendresse avec le chien Pok Pok
Les moments d’amour avec son épouse
Comme de belles échappées
Une expérience de l’instant
De l’ici et maintenant
À la ligne
Didier Perrier
EXTRAITS PRESSE (Sortie de résidence au Familistère de Guise)
L’Aisne nouvelle – Une écriture à fleur de peau sur la condition ouvrière.
Une expérience théâtrale originale, intense, ultra-sensible et riche en humanité
La Thiérache – Une belle leçon de vie industrielle en accord avec notre territoire
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Février. Je tombe sur un article dans Libé, parlant du jeune auteur rémois Joseph Ponthus. J’y apprends l’existence de son livre À la ligne, l’existence de Ponthus même, et sa mort, tiens, par la même occasion.
Je fonce chez le libraire. « Ah oui j’en ai entendu parlé de ce bouquin, il avait l’air sympa ce gars-là ». J’achète le livre, et le lis. D’une traite.
Je suis frappée, par l’intelligence du propos, l’émotion qui s’en dégage, et par la forme qui, pour une fois, n’obscurcit pas le fond. « Ecrit en vers libre, sans ponctuation, encore un truc d’intello. » pourrait-on penser. Et bien non. Pourtant, Ponthus, c’est carrément un intello. On le sent dans les références, dans les liens, dans sa capacité à décrire et analyser ce que fait ce travail sur lui, son corps, son cerveau, sur sa vie.
Mais il le fait avec une telle générosité ! Il est tellement bonhomme ! Avec tant d’humour, d’amour, de chaleur, que tout est limpide. Il explore la dimension émotionnelle de ce qu’il vit à l’usine, là où tout le monde se raconte qu’au travail, « on met les émotions de côté ». Ben voyons.
Je ne peux m’empêcher de penser à ces ouvriers, ces salariés, ces cadres, ces patrons, avec qui je travaille depuis que j’ai fait une place à une 2ème activité professionnelle dans ma vie. Je les vois se débattre avec l’âpreté du monde du travail. En lutte. Avec le collègue, avec le patron, avec la machine… et pourtant ils m’ouvrent grand leur cœur quand je travaille avec eux. Je sais qu’un espace d’authenticité, d’humanité est possible, même là-bas.
Arrive Avril. « Tiens Didier, tu devrais lire ça. Ça peut te plaire, et il y a sans doute un truc théâtral à faire avec. »
Il l’achète, le lit. Et me prend au mot.
Nous sommes en juin, et il nous propose le projet, à Laurent Nouzille et moi.
Nous tombons vite d’accord sur l’envie de pouvoir amener ce texte de là d’où il vient. Comme une utopie : allez, on retourne quelques palettes, on monte dessus et on va le jouer dans les ateliers, dans les usines, dans les entrepôts ! Pour les cols bleus ! Et puisqu’il est écrit par un col blanc, allez, on fait aussi une version pour le jouer en salle !
Moi, c’est cela qui me touche le plus dans ce texte. Il relie 2 mondes, sans jugements, sans aigreurs ni sur l’un ni sur l’autre. Il dénonce et questionne, mais n’oppose pas, ne clive pas.
Pas de ponctuation, pas de point, dans À la ligne.
Mais il y a un trait d’union. Entre 2 castes, 2 classes, 2 mondes, entre les hommes.
Mélanie Faye
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